USA/Israël : dangers pour la paix
Géopolitique
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Internet n’oublie rien, ce qui est parfois un inconvénient mais souvent un avantage. Cela permet de retrouver un billet posté sur un autre blog en 2015 à propos de l’image que se font les européens des États-Unis et d’Israël par rapport à la paix dans le monde. Dix ans et quelques guerres plus tard, on peut reprendre tel quel le début du texte: la situation n’a fait que s’aggraver. Ni Israël ni les pays arabes ne cherchent à trouver une solution de compromis. La survie d’Israël est toujours en question. En termes géopolitiques cependant le risque que représente Israël demeure régional, alors que l’interventionnisme tous azimuts de USA est de plus en plus dangereux.
Israël et les États-Unis, déclarés dangers publics…
“ Décidément, les Européens ne sont pas politiquement corrects. La Commission européenne vient de publier les résultats de son dernier Eurobaromètre. Une des questions demandait aux Européens quels pays représentaient une « menace pour la paix du monde ». C’est Israël qui a gagné, suivi par les États-Unis, eux-mêmes placés par les répondants à égalité avec l’Iran et la Corée du Nord.
Embarras dans les Chancelleries. Ariel Sharon aurait suggéré à Bush de construire un mur autour de l’Europe, mais celui-ci est trop en colère pour pouvoir articuler un mot. Son copain Berlusconi, qui se trouve momentanément à la tête de la Communauté Européenne, s’est confondu en excuses. Comme de toute façon il n’est pas crédible, on a demandé à Romano Prodi d’expliquer aux mécontents que ce point de vue ne reflétait pas celui de l’Union Européenne. Prodi a l’échine assez souple pour pouvoir affirmer, la main sur le cœur : « Ils m’ont élu, mais je ne pense pas du tout comme eux. » (N.B. Toute ressemblance avec les plus récentes élections européennes ou françaises serait purement fortuite).
Un porte-parole Israélien estime qu’il faudrait donner « un carton jaune, ou même un carton rouge » à l’Europe pour avoir eu de telles pensées. Ainsi dans certains sports, quand des joueurs trichent, l’arbitre sanctionne le public. Bush a lui aussi son côté schizophrène; il annonce que tout va de mieux en mieux en Irak après chaque attentat. Ce sont les Néerlandais – à 74% - qui ont donné un carton rouge à Israël. Ni les États-Unis ni Israël ne souhaitent le malheur du monde, mais ils ne supportent pas qu’on les critique.”
2024 : mêmes condamnations, mêmes déchirements
L’opinion internationale est toujours aussi divisée au sujet d’Israël. Les gouvernements occidentaux sont favorables à Israël mais leurs opinions publiques sont divisées. En France un parlementaire dont le parti refuse de qualifier d’attentat terroriste le massacre perpétré par le Hamas en septembre 2024, exhibe un drapeau palestinien au cours d’une séance de l’Assemblée nationale.
Dans la rue européenne la tension est évidemment devenue plus forte dans un contexte où il ne se passe pas un jour sans qu’un homme ou une femme ne s’y fasse agresser, ce qui va de la simple claque au viol ou à l’égorgement. Le problème islamique dans chaque pays européen influence désormais l’opinion des populations au sujet du conflit Israelo-palestinien. La dénonciation du sionisme se mue en antisémitisme; la défense d’Israël et des juifs devient un symbole de la lutte contre l’islamisme.
Jusqu’où Israël peut-il aller trop loin ?
Israël a toujours dit qu’il répondrait à chaque coup qui lui serait porté par une riposte dix fois plus sévère. Depuis le 7 septembre 2024 il écrase la bande de Gaza et sa population sous les bombes, intensifie sa colonisation de la Cisjordanie, attaque le Hesbhollah au Liban et s’interroge sur l’opportunité d’une guerre ouverte contre l’Iran.
Cette fois la puissance de sa riposte n’est pas 10 fois mais 100 fois plus forte que le pogrom perpétré par le Hesbollah. Sur le plan symbolique les cartes sont irrémédiablement brouillées. Rien ne peut compenser la barbarie des combattants du Hamas, mais envisager une réplique “équivalente” reviendrait à rejoindre l’adversaire dans le registre de la barbarie. On ne peut écraser pendant plus d’un an 2 millions d’êtres humains coincés sur un territoire grand comme la moitié de Madrid (365 km2 contre 604 km2) sous une pluie de bombes et de missiles sans se faire accuser de mener une politique génocidaire. Tel est le fatum qui pèse sur Israël, montrant sa force et sa détermination il fournit au peuple palestinien et aux populations du Moyen Orient des martyrs et de nouvelles raisons de haïr un État qui a été crée au milieu d’eux contre leur volonté.
Le double jeu des pays arabes.
Du côté arabe, les États riches du golfe cherchent à faire des affaires avec Israël tout en finançant en sous-main des groupes terroristes anti-israélien et la diffusion dans le monde d’un Islam qui souhaite l’éradication de l’État hébreux. L’ensemble des États arabo-musulmans instrumentalise depuis toujours avec cynisme la cause palestinienne. Ces États se battront contre Israël jusqu’au dernier palestinien comme les États-Unis sont prêts à se battre contre la Russie jusqu’au dernier ukrainien. Avec cette différence qu’Israël lutte pour sa vie et que ses ennemis sont de l’autre côté de la rue, quand les États-Unis n’ont jamais connu ni craint une guerre venue de l’étranger sur leur sol.
Les USA : faiseurs de paix, fauteurs de troubles
2015-2025 : Les États-Unis n’ont pas changé eux non plus, mais ils ont l’avantage de pouvoir avancer masqués. Ils arment Israël et le soutiennent mais tentent de limiter sa riposte. Ils ont besoin d’Israël comme grande puissance occidentale au milieu d’un Moyen-Orient compliqué. Depuis plus de trente ans qu’Ils cherchent à faire la loi au Moyen-Orient et à y implanter la “démocratie” au bout de leurs canons ils n’ont connu que des échecs. Cela les a rendu prudents. Il leur convient davantage de voir cette région demeurer empêtrée dans le bourbier créé par leurs propres interventions, le conflit avec Israël et les rivalités entre États arabes. Le containment des parties adverses est pour eux un objectif acceptable aussi longtemps que l’accès au pétrole est protégé et qu’ils peuvent signer quelques contrats juteux avec tel ou tel État arabe. Par là on voit que la gestions de conflits plus ou moins gelés n’est pas qu’une spécialité sovieto-russe.
En Europe, les États-Unis ont délibérément poussé la Russie à la faute en espérant que l’agressé devenu agresseur serait militairement rapidement vaincu, « quoi qu’il en coûte » en termes de morts ukrainiens. Comme leur plan n’a pas marché, ils repassent le problème aux européens. Sans perdre la main cependant, puisque l’Union européenne de Mme von der Leyen leur est inféodée, que des dirigeants mentalement instables comme M. Macron poussent au crime et que l’OTAN est passée du statut d’organisation militaire défensive au statut d’organisation politico-militaire offensive.
Les menées de l’impérialisme américain sont assez claires pour quiconque a le temps et les moyens de les analyser, mais elles peuvent faire illusion longtemps. Elles sont plus diffuses, plus souterraines, en un mot moins archaïque que l’affrontement qui oppose Israël aux pays arabes.
Un Trump revenu au pouvoir favoriserait sûrement les ventes d’armement américain à travers le monde – ce qui implique une persistance des conflits armés sur la planète – mais s’opposerait à ce que les États-Unis reprennent des croisades militaires qui coûtent à Washington plus cher qu’elles ne rapportent. Une Amérique Trumpienne jouera volontiers le rôle d’équipementier du chaos mondial: vendre du matériel sophistiqué est très rentable et assure un certain contrôle politique. Militairement les USA resteront présents sur les différents théâtres d’opération par l’intermédiaire de leurs 800 bases militaires à travers le monde, leurs services secrets, leurs sociétés militaires privées et grâce aux unités d’élite que la Grande Bretagne met servilement à leur disposition.